En 1933, il part seul pour Majorque. Sa femme et leur fille le rejoindront après quelques mois. Un an plus tard à peine, ils s’embarquent pour l’Amérique du Sud. En Argentine (Buenos Aires), il travaille pendant quelque temps dans une fabrique appartenant à des cousins de sa femme – il faut bien vivre...

Des difficultés personnelles ainsi que des échecs sur le plan de la peinture et des préparatifs artisanaux caractérisent ces années. Il piétine, et se consacre de nouveau au dessin et à la gravure à l'eau-forte.

Il est d'autre part confronté à des problèmes financiers, sans parler des crises conjugales périodiques. Elles absorbent toutes ses forces et le tiennent éloigné de ses exigences artistiques. Finalement, séparé de sa famille, il vit en solitaire dans une cabane en bois près d'Atlantida (Uruguay), sur la rive nord du río de la Plata.

Sa technique et son savoir-faire artistique sont loin de le satisfaire. D'autre part, la distance ne saurait résoudre les problèmes nés de la vie commune. Les conjoints sont de fortes personnalités et tous deux ont grandi dans un milieu aisé. Or, la peinture ne leur permet pas de conserver ce niveau de vie.

Toutefois, cette période difficile enrichira sa collection de souvenirs anecdotiques, qu'il contera avec des mimiques expressives, l'œil malicieux et une gestuelle quasiment méridionale: la voile qui se déchire sur le Rio de la Plata, l'histoire savoureuse de la femme d'un pêcheur qui devait demander à son mari le nombre et les noms de leurs enfants communs, l'épaule et les côtes brisées lors d’un accident de voiture et les exercices de gymnastique fantaisistes conçus par lui pour se rétablir, les hallucinations dues à un excès de thé qui a déclenché le processus de sa calvitie, les fenêtres de la cabane complètement aveuglée par une armée de tarentules, sans parler de la panthère noire apprivoisée par le voisin inconscient à la lisière de la forêt vierge…